… à propos de la presse pas pareille mais pas que !
L’affaire WikiLeaks – Médias indépendants, censure et crime d’État – Stefania Maurizi – Ed. Agone 2024
WikiLeaks a diffusé des centaines de milliers de documents classifiés. Le Pentagone et la NSA ont tout fait pour discréditer un travail journalistique extrêmement exigeant, et détruire (notamment en s’attaquant à ses sources) une organisation qui se bat pour la transparence et la liberté de l’information. A travers la persécution judiciaire qui s’est abattue sur Julian Assange et ses collaborateurs et collaboratrices au sein de WIkiLeaks, l’autrice révèle le danger que font peser de très puissantes institutions comme le Pentagone, la CIA et la NSA – le “complexe militaro-industriel” des États-Unis – sur la démocratie : non seulement en dissimulant des crimes d’État particulièrement graves, mais aussi en exerçant une surveillance de masse au prétexte de lutter contre le terrorisme, par des méthodes dignes des pires régimes totalitaires. Elle pose donc en filigrane la question de la réalité de nos démocraties, et de la place du journalisme dans celles-ci, en soulignant le paradoxe de la situation : un journaliste s’est vu emprisonné et traité comme un terroriste et un criminel pour avoir dénoncé des crimes de guerre et des dérives du pouvoir tout aussi intolérables.
Écrire en luttant : les ouvrier-es de LIP et leur journal – Guillaume Gourgues, Georges Ubbiali – Ed. Syllepse 2023
Pourquoi relire Lip Unité aujourd’hui, cinquante ans après?
Tout simplement parce que faire revivre la façon dont les ouvrier·es de Lip n’ont eu de cesse de prendre la plume pour se battre est une manière de contribuer, modestement, au renforcement du syndicalisme. Si le récent mouvement contre la réforme des retraites marque un retour en grâce de l’outil syndical, il est indispensable de mener un travail de fond sur son enracinement dans des mobilisations collectives, à l’échelle de l’entreprise et de la société.
Lip Unité permet de comprendre comment la pratique d’un syndicalisme ouvert, démocratique et assumant le conflit de classe est une épreuve de chaque instant, même au cœur des années 1970.
Loin de la nostalgie d’un âge d’or des luttes ouvrières, les écrits des Lip nous rappellent, un demi-siècle plus tard, que la lutte collective articule la recherche et le maintien d’un collectif, la combinaison de l’action (la grève, l’occupation) et de la réflexion (les contre-propositions) et la popularisation.
La première revue féministe francophone. Les Cahiers du Grif – Caroline Glorie, Teresa Hoogeveen – Ed. Les Impressions Nouvelles 2023
Il y a un demi-siècle que le premier numéro des Cahiers du Grif, la première revue féministe francophone européenne, a vu le jour. Fondée en 1973, la revue est coordonnée par un groupe composé seulement de femmes et basé à Bruxelles : le Groupe de Recherche et d’Information Féministes. Dans les années 1980, la revue s’enracine à la fois à Bruxelles et à Paris sous la direction de Françoise Collin. Ce livre est le premier à lui être exclusivement consacré : il cherche à établir un espace de discussion dans lequel les thèmes, les figures et les pratiques des Cahiers du Grif peuvent prendre toute leurs significations.
Le projet de ce volume est double : offrir une introduction à la revue pour un large public intéressé par les théories féministes et l’histoire du féminisme, et montrer la grande variété des thèmes, des préoccupations et des pratiques qui peuvent faire l’objet de recherches tels que l’amour, le corps, la sororité, la figure d’Hannah Arendt ou de Simone de Beauvoir.
Il n’y a que moi que ça choque ? – Rachid Laïreche – Ed. Les Arènes, 2023
Les liens d’interdépendance – on pourrait dire les obligeances réciproques –, le off et les déjeuners avec les politiques, les relations avec les autres journalistes : Rachid Laïreche chronique de l’intérieur l’entre-soi et la superficialité du journalisme politique. Ayant occupé la fonction à Libération pendant huit ans, il raconte, au fil des pages, son apprentissage des codes et des pratiques, sa progressive mise en conformité avec les attendus de ses chefs et son immersion dans le monde social de ses confrères et consœurs. Puis son malaise et sa prise de distance avec un métier enfermé dans sa « bulle » et qui se limite bien trop souvent à une « chronique de la courtisanerie ». Publier un article bienveillant pour gagner les faveurs d’une source, déjeuner avec un président de la République et lui poser des questions futiles, traiter de sujets de fond sans n’y rien connaître… la succession d’anecdotes dessine ainsi, au fur et à mesure, un portrait (auto)critique. Focalisation sur les stratégies de communication et les petites phrases, obsession des sondages, politique « politicienne »… le constat n’est pas nouveau – on peut d’ailleurs répondre aisément à sa question : non, il n’y a pas que lui que ça choque… Un ressaisissement de la profession sera-t-il prochainement à l’ordre du jour ? C’est ce qu’appellent de leurs vœux l’auteur et avec lui François Ruffin, qui signe la postface. On voudrait y croire… (Maxime Friot pour Acrimed)
Les médias contre la gauche – Pauline Perrenot – Agone Editeur, 2023
Cet essai est le procès d’une absence, celle de la gauche, reléguée au second plan de l’information médiatique. L’autrice analyse la façon dont le débat public a été verrouillé par les médias dominants, qui ont redoublé d’efforts pour bipolariser les champs politique et journalistique autour des figures d’Emmanuel Macron, de Marine Le Pen et de leurs thématiques sécuritaires et économiques. Fondé sur une documentation précise, l’ouvrage retrace l’effondrement intellectuel du “journalisme politique”, qui a perdu tant en substance qu’en consistance, laissant le storytelling remplacer l’information. L’autrice aborde notamment le traitement des différents projets de réformes par les chefs-lieux éditoriaux, souvent transformés en SAV du gouvernement… S’appuyant sur l’émergence de la com’ comme cadre politique et journalistique, Pauline Perrenot (Acrimed) dévoile le monopole absolu de la pensée libérale dans les médias et l’imbrication de la profession avec le monde patronal. Un président créé de toutes pièces par les médias, la croisière journalistique de l’extrême droite, des emballements réactionnaires qui ponctuent les séquences des chaînes d’information… drôle d’état que celui de la presse dans l’Hexagone. Pauline Perrenot s’appuie sur le traitement des thèmes qui ont “fait” l’actualité : maintien de l’ordre, sondages, loi sécurité globale, gilets jaunes, violences policières, émergence de Zemmour.
A bas la presse bourgeoise – Dominique Pinsolle – Ed. Agone – Contre feux 2022
Certainement un des livres les plus intéressant et les plus complets quant à une histoire de la presse. Sous titré « Deux siècles de critique anticapitaliste des médias », cet ouvrage propose une épopée où la liberté de la presse est régulièrement mise en cause par une bourgeoisie qui souhaite conserver un monopole autant politique qu’économique.
À travers de nombreux exemples et références, l’auteur nous conte les différentes époques, plus ou moins favorables à la presse libre. Avec malheureusement, toujours en embuscade, la presse bourgeoise, du grand capital, qui sait patienter et manœuvrer pour retourner la situation en sa faveur.
Ainsi, avec des hauts et des bas, dans un phénomène cyclique, les périodes de libération sont régulièrement suivies de périodes de concentration des médias aux mains de quelques grandes fortunes. « De 1836 à nos jours » où quand ce phénomène de concentration atteint son paroxysme et que la critique des médias n’a jamais été aussi partagée. Une histoire en cours…
Voix Off : imprimerie de femmes – Natalia Passaquin et Fanny Myon – Ed. Cahiers des Typotes, 2022
Voix Off était une imprimerie non mixte fondée à Paris en 1982 par quatre femmes militantes du MLF désireuses de créer un lieu de travail bienveillant dans une période d’effervescence et d’initiatives féministes. En imprimant des textes écrits par d’autres femmes, des revues féministes et lesbiennes, des affiches, des tracts et des livres, elles manifestaient leur opposition à la domination masculine dans le domaine. Leur production s’est diffusée dans les milieux alternatifs et militants jusqu’en 1988.
Pour ce cahier Natalia Passaquin et Fanny Myon ont rencontré deux imprimeuses de Voix Off, Florence et Françoise, ainsi que d’autres militantes du MLF : Suzette Robichon et Marie-Victoire Louis, éditrices et Catherine Deudon, photographe. Elles leur ont ouvert leurs portes et leur ont fait découvrir leurs magnifiques bibliothèques. Elles ont partagé avec elles leurs souvenirs, leurs histoires et ont témoigné de leurs parcours et de leurs implications dans les luttes féministes de l’époque. Grâce à leur générosité elles ont eu accès à des archives, des photographies, des revues, des affiches, des tracts et des livres, dont certains furent imprimés par Voix Off.
FANZINAT – Passion et histoires des fanzines en France – Documentaire réalisé par Laure Bessi, Guillaume Gwardeath et Jean-Philippe Putaud-Michalski – Prod. Metro Beach, 2022
Les fanzines sont des publications artisanales animées contre vents et marées par des fanatiques de cultures de niches voire underground. Assurément, ils constituent une forme bien singulière – pourtant méconnue – de la presse et de l’édition. Le film raconte l’histoire du fanzinat en France en allant à la rencontre de celles et ceux qui l’ont faite et qui la font encore. Science-fiction, bande dessinée, mouvements musicaux punk ou rap, graphisme, sport, tatouage, enjeux de société… La variété des causes et des thématiques embrassées par les activistes du fanzinat paraît sans limite. Une leçon de passion.
L’insurgée – Séverine – Ed. L’échappée 2022
Caroline Rémy, dite Séverine (1855-1929), aura été l’une des pionnières du journalisme et l’une des grandes figures de l’histoire des mouvements révolutionnaires. Disciple et amie de Jules Vallès, première femme à diriger un quotidien national, elle se lance à corps perdu dans la grande mêlée sociale de la « Belle Époque ». Sa plume, ardente et infatigable, n’aura de cesse de défendre le peuple face à ses ennemis : le capital et la bourgeoisie. Féministe, pacifiste et libertaire, d’une intégrité à toute épreuve, elle sera en première ligne de tous les combats de son temps.
Durant toute sa vie, Séverine a écrit plus de 6 000 articles dans de nombreux journaux : Le Cri du Peuple, La Fronde, Gil-Blas, L’Humanité, Le Figaro, etc. Dans ce recueil sont réunis ses textes les plus flamboyants. Au détour de ces pages apparaissent les grands et petits noms de l’anarchisme auxquels elle rend hommage, les innombrables batailles des femmes et du mouvement ouvrier, et le parfum de poudre et de révolte de ces années tumultueuses.
Une Vie Parallèles – Documentaire de Xanaé Bove – Prod. Capuseen, 2022 (DVD)
Excellent documentaire qui mêle musique, politique, journaux et fanzines. Superbe travail historique pour remonter le temps des 70′ à aujourd’hui, pour retrouver une cartographie parisienne riche en lieux alternatifs et références.
L’Assiette au Beurre croque les bigots – Dessins anticléricaux d’une revue satirique – Ludivine Péchoux – Ed. de la Lanterne, 2021
Revue satirique de renom, “L’Assiette au Beurre” a réuni les meilleurs caricaturistes de la Belle Époque: Gustave Jossot, Jules Grandjouan, Théophile Steinlen, etc. Engagés dans des luttes d’émancipation et convaincus que la raison et la science doivent éclairer le monde, ces artistes ont réalisé un grand nombre de dessins qui tournent en dérision le clergé et les croyances religieuses. Le présent ouvrage rassemble pour la première fois un catalogue de 250 caricatures anticléricales de “L’Assiette au Beurre”. Elles témoignent des nombreux thèmes – laïcité, éducation, morale, etc. – abordés par ce courant de pensée alors particulièrement dynamique en France, notamment dans les milieux de gauche.
Sans Pub & Sans Pitié – Quatorze années d’un journal libre et indépendant à Lille – La Brique – Ed. Les Etaques, 2020
Ce livre est une plongée non-exhaustive dans le travail collectif du journal lillois La Brique, qui défie depuis plusieurs années La Voix du Nord et le pouvoir socialiste implanté dans la métropole nordiste, revendiquant une presse libre “sans pub et sans pitié.”
Presse Parallèle – La contre-culture en France dans les années soixante-dix – Steven Jezo-Vannier – Ed. Le Mot et le Reste, 2020
Elle est l’outil privilégié de la contestation, l’incarnation de la contre-culture qui a vu le jour, en France, dans le sillage de Mai 68. Elle donne à entendre une parole libérée qui se répand dans tous les domaines de la société et génère autant de mouvements d’émancipation et de remise en cause du système dominant. En s’appuyant sur les titres emblématiques, ce livre dresse le portrait d’une nouvelle presse et d’une génération qui a conquis sa liberté à la force des idées et des mots. Il fait le portrait des années 70 pleines d’effervescence qui ont vu jaillir le mouvement écologiste, la libération des femmes, les revendications des homosexuels, les mouvements communautaires, les réflexions en matière de santé, d’éducation, de justice, et de rapport à l’autre et à la différence. Né en 1984, Steven Jezo-Vannier est spécialiste de la contre-culture et de l’univers rock. Il est l’auteur de San Francisco, l’utopie libertaire des sixties, aux Éditions Le Mot et le Reste.
Tout ! – Manus McGrognan – Ed. L’echappée, 2018
« Ce n’est qu’un début, continuons le combat ! » Après Mai 68, et malgré la répression policière, les groupuscules gauchistes se recomposent et tentent de poursuivre l’aventure révolutionnaire. Parmi eux, les étudiants de Vive la Révolution détonnent. Ces maoïstes tendance libertaire, ou « mao spontex » comme on les qualifiera, militent auprès des ouvriers, notamment immigrés, tout en étant fortement influencés par les mouvements radicaux américains. Leur journal, rebaptisé Tout !, quinzomadaire grand format aux couleurs vives ayant Jean-Paul Sartre pour Directeur de publication, cherche à fomenter une révolution à la fois politique et culturelle. Il ouvre ses colonnes aux mouvements et luttes antiautoritaires qui foisonnent : libération des femmes, antipsychiatrie, combats des homosexuels, jeunes en colère… Bien qu’éphémère, cette extraordinaire expérience d’un journal foutraque se trouve au carrefour de trois courants : gauchisme, nouveaux mouvements sociaux et contre-culture. Pour la première fois racontée, cette histoire montre comment Tout ! a concentré de façon explosive ces influences, qu’il a agrémentées de slogans percutants et d’un graphisme éclatant, pour devenir le fer de lance de la presse alternative.
Pour une socioanalyse du journalisme – Alain Acardo – Ed. Agone, 2017
« La représentation médiatique du monde, telle qu’elle est fabriquée quotidiennement par les journalistes, ne montre pas ce qu’est effectivement la réalité mais ce que les classes dirigeantes et possédantes croient qu’elle est, souhaitent qu’elle soit ou redoutent qu’elle devienne. Autrement dit, les médias dominants et leurs personnels ne sont plus que les instruments de propagande, plus ou moins consentants et zélés, dont la classe dominante a besoin pour assurer son hégémonie. »
Les lecteurs habitués aux concepts de la sociologie bourdieusienne ne découvriront sans doute rien de bien nouveau sur le plan théorique dans ce petit livre. Mais ils apprendront peut-être de quelle manière on peut les mettre directement en application dans un projet indissociable de connaissance et d’émancipation personnelle et collective. Quant aux lecteurs peu ou pas du tout familiers avec ces outils et ces auteurs, ils pourront découvrir de la manière la plus claire pourquoi et comment cette socioanalyse du métier de journaliste est en même temps celle d’une classe sociale dont cette corporation est une fraction emblématique, la petite bourgeoisie intellectuelle.
Médias : le peuple n’est pas condamné à TF1 – Vincent Goulet – Textuel 2014
Peut-on inventer des médias alternatifs, de gauche et populaires ? C’est la question que pose, à l’appui d’exemples historiques, le sociologue Vincent Goulet dans son ouvrage Médias : le peuple n’est pas condamné à TF1. Ce livre tente d’identifier les blocages et les impasses d’une presse de gauche qui peine souvent à sortir des cercles intellectuels ou militants. Certes, alors qu’une importante fraction du prolétariat a toujours été attirée par les idées entrepreneuriales et conservatrices, les dernières décennies ont été marquées par l’hégémonie culturelle néolibérale et une moindre visibilité d’une vision socialiste de la société. Le manque d’innovation de la pensée de gauche n’est cependant pas seul en cause. Le faible ancrage des journalistes engagés dans les milieux populaires et leur culture, leur difficulté à prendre en compte les usages « ordinaires » des informations dans la vie de tous les jours, leur conception savante et finalement technocratique de la politique sont autant de barrières inconsciemment levées entre le « peuple » et une parole médiatique émancipatrice.
Les aides publiques à la presse : trente ans de gabegie – Sébastien Fontenelle – Libertalia 2014
« Les journaux et magazines “de référence” publient régulièrement de longues exhortations à “réduire la dépense publique”, et des anathèmes contre “la France des assistés”. Mais depuis trente ans, ces mêmes publications sont littéralement gavées de millions d’euros d’aides publiques – qui ne servent à rien, puisque la presse écrite continue de s’enfoncer dans une crise structurelle. Mais qui représentent jusqu’à 12 % de leur chiffre d’affaires. Cette gabegie, documentée par de nombreux rapports, est de celles qui font généralement, pour les journalistes spécialisés dans la chasse à l’“assistanat” et aux “gaspillages”, un scandale réussi. Or la révélation que le contribuable nantit la presse écrite de gigantesques subventions ne leur inspire aucun commentaire. Car ici, le silence est d’or : l’éditocratie sous perfusion l’a parfaitement compris, qui continue de faire sponsoriser par l’État ses incessants appels à diminuer la dépense étatique… »
L’opinion, ça se travaille… les médias et les “guerres justes” – Serge Halimi, Mathias Reymond, Dominique Vidal, Henri Maler – Ed. Agone, 2014
« Quand le général Lévy sonne l’alarme, les petits soldats du journalisme sont au garde à vous. Carl Meeus laisse même entendre, non sans fierté, qu’il faisait partie du plan de communication du philosophe : “[Bernard-Henri Lévy] mobilise ses réseaux intellectuels en France et voit Daniel Cohn-Bendit au Flore pour qu’il fasse de même avec ses amis allemands. […] Depuis l’Hôtel Raphaël où il loge, BHL organise une rencontre entre des représentants du CNT, Ali Zeidan et Mansour Saif al-Nasr, et des leaders d’opinion français parmi lesquels André Glucksmann, Harlem Désir, Bernard Kouchner, Pierre Bergé et Laurent Joffrin.” »
Dans Le Point, BHL est présenté comme « l’autre ministre des Affaires étrangères », où le chroniqueur maison voit son arrivée en Libye décrite avec un comique peut-être involontaire : « Il marche en équilibre sur des gravats, console une femme éplorée, interpelle des jeunes garçons… » Dans Le Figaro Magazine, les échanges profonds entre le président et l’envoyé de la République furent retranscrits à la lettre : « BHL réussit enfin à joindre Sarkozy. Il lui raconte la Libye, le chaos, mais aussi l’espoir et la réunion du CNT. “Ce sont les Massoud libyens, crois-moi. Si tu les reçois, c’est un acte politique majeur”, s’enflamme le philosophe – qui ne fut pas le seul à s’enflammer… » .
Détruire les villes avec poésie et subversion – Désurbanisme, fanzine de critique urbaine (2001-2006) – Ed. Le Monde à L’Envers, 2014
« Détruire les villes ? Mais vous n’y pensez pas ? Mais si, mais si, on y pense… évidemment on ne va pas y aller au bulldozer , pas non plus avec le dos de la cuillère. Pour l’instant, on utilise la poésie pour semer le doute dans les têtes… Et si une nuit étoilée ou une énorme vague avait plus de sens qu’un bus bondé aux heures de pointe? » Espace dominé et structuré par le Capital, la ville offre un terrain de lutte et de critique du capitalisme. Publié de 2001 à 2006, Désurbanisme est un fanzine d’amoureux des villes passionnés par leur destruction, une boite à outils mêlant pensées et expériences critiques dans laquelle la lutte peut puiser du combustible.
Le Père Peinard – Journal “espatrouillant” – Articles choisis et annotés (1889-1900) – Ed. Les Nuits Rouges, 2013
La renommée de ce fameux périodique est due au style très coloré, et fort violent, utilisant un argot parisien plein de verve, de son rédacteur quasi unique, Émile Pouget – un des fondateurs de la CGT. Sa (re)lecture chronologique illustre l’évolution de l’anarchisme français vers le syndicalisme, à travers les événements qui secouèrent le pays : le boulangisme, le scandale de Panama, les attentats à la dynamite et l’affaire Dreyfus. Le Père Peinard constitue aussi un témoignage de première main sur la condition des ouvriers de l’époque, ainsi que sur leurs luttes contre les « capitalos » et les « vautours », les « endormeurs » et les « ratichons », les « sergots » et les « galonnards », sans oublier les « bouffe-galette » du « Palais-Bourbeux ».
Les patrons de la presse nationale, tous mauvais – Jean Stern – Ed. La Fabrique, 2012
La presse va mal en France parce que les patrons du CAC 40 ont mis la main dessus : telle est l’idée centrale de ce livre. À la Libération, on ne parlait que de mettre les journaux à l’abri des puissances d’argent, de protéger leur indépendance. Mais au fil des années, cette louable ambition s’est effilochée. Aujourd’hui, les Arnault, les Dassault les Pigasse, les Lagardère, les Pinault, les Bolloré et autres seigneurs contrôlent la presse nationale via leurs holdings aussi opaques que rémunératrices. Jean Stern, homme de presse s’il en est, montre comment les “journalistes-managers” – July, Colombani – ont conduit Libération et Le Monde à leur perte avant d’en être éjectés sans égard. Comment les journaux qui perdent de l’argent permettent aux patrons de payer moins d’impôts ? Comment les divers “conseils de surveillance”, “chartes d’indépendance” et autres gadgets n’empêchent nullement les patrons de pressurer les rédactions en exigeant des économies ?
Les journaux finiront-ils en “fermes de contenus” où des pigistes à domicile rédigeront des “articles” à la chaîne adaptés aux algorithmes des moteurs de recherche ? C’est ce que l’on peut craindre si l’on laisse faire le capitalisme déchaîné.
Médiactivistes – Dominique Cardon & Fabien Granjon – Ed. SciencesP. 2010
La production de l’information est depuis longtemps un enjeu de lutte. Le développement de vastes conglomérats de médias professionnels tout au long du XXe siècle n’a cessé de susciter des inquiétudes et d’encourager le développement d’un « médiactivisme » qui s’est construit en opposition, ou à côté, des médias dominants. Ce médiactivisme a dès l’origine pris deux chemins parallèles : celui d’un combat contre l’hégémonie culturelle des espaces publics traditionnels et celui de la production d’un autre type d’information sur des bases militantes, locales et communautaires. Aussi son évolution doit-elle être pensée en interaction étroite avec celles de l’espace journalistique et des transformations du répertoire d’action du mouvement social Cet ouvrage propose une histoire des médias alternatifs depuis les années 1960. Il s’attache à mettre en évidence sa variété, des expériences de presse révolutionnaire au mediactivisme en réseau du mouvement altermondialiste, en passant par les médias communautaires, l’internet militant, le mouvement des radios libres ou encore la création d’agences de presse dans les pays du Sud.
Les années 70, un âge d’or des luttes ? – Lilian Mathieu – Ed. Textuel, 2010
Les années qui ont suivi Mai 68 restent dans les mémoires comme une période mythique sur le plan des mouvements sociaux. Ouvriers, femmes, immigrés ou encore homosexuels et écologistes, ces contestations émanant de groupes divers ont bouleversé la société de l’époque. Dans ce livre, Lilian Mathieu ne se contente pas de retracer l’histoire des seventies contestataires, il tire les principaux enseignements que ces combats passés peuvent apporter aux luttes du présent.
Pourquoi le Daubé est-il Daubé ? Histoire critique du Dauphiné Libéré – Ed. Le Monde à l’Envers, 2010
C’est une affaire entendue depuis des dizaines d’années : dans les bistrots, les ateliers, les salles d’attente ou les chaumières ; à Grenoble ou ailleurs, on appelle le Dauphiné Libéré le « Daubé ». Ce surnom lui va si bien, résonne tellement comme une évidence que personne ne se donne la peine de l’expliquer. D’où vient-il ? Un hasard, un mauvais jeu de mots ? On ne sait pas. Le Dauphiné Libéré est daubé, voilà tout. Pourquoi perdre son temps à le démontrer ?
Mais à trop se reposer sur cet acquis, on en ignore les enseignements. Car chercher à comprendre pourquoi le Dauphiné Libéré est daubé permet bien plus que de s’interroger sur le bien-fondé d’un surnom. Cela permet de faire un voyage au coeur de l’histoire de la Presse Quotidienne Régionale, de la presse en générale et de la vie politique grenobloise et d’en ramener des éléments de compréhension et de critique du monde dans lequel on vit. Tel est le but de ce feuilleton qui tâche d’étudier l’histoire, le développement et le fonctionnement actuel du Daubé.
Presse communiste, presse radicale (1919-2000) – Passé/Présent/Avenir ? – Sous la direction de José Gotovitch et Anne Morelli – Ed. Aden, 2007
Du XIXe siècle à nos jours, une presse écrite a scandé, à travers toutes les nuances de la gauche radicale, l’actualité et le combat politiques, s’érigeant en porte-parole, en agitatrice, en organisatrice et parfois même en raison d’être de multiples groupes ou organisations. Ces journaux ont construit les cultures spécifiques des mondes communiste, anarchiste, trotskiste, anarcho-syndicaliste et autres. Ils ont contribué à façonner les militants, les ont mobilisés, éduqués, ont quelquefois agité l’opinion, mais sont souvent demeurés à tout jamais confidentiels et sans continuité. Aujourd’hui que les techniques et l’évolution sociologique modifient les formes et les structures militantes, il est utile et urgent de s’intéresser, au delà de l’histoire politique, et pour pallier l’inexistence d’archives de cette “petite presse” et la disparition de ses acteurs, au fonctionnement de celle-ci. Cet ensemble d’études, belges et internationales, ciblent deux directions principales : la fabrication, le financement, la diffusion, le public, d’une part ; les rapports internes entre direction et rédaction, entre rédaction et pouvoir tutélaire, politique et financier d’autre part. Ces études constituent donc une halte sur un passé foisonnant et très mal connu et se veulent contribution aux interrogations sur l’avenir.
Journalistes précaires, journalistes au quotidien – Alain Accardo – Ed. Agone, 2007
Le secteur de la presse est certainement de ceux où la précarisation des petits salariés est la plus galopante. La corporation, pourtant truffée de grandes consciences toujours prêtes à délivrer des leçons d’humanisme sans frontières, ne s’émeut guère de la condition galérienne qui est faite, en son sein, à des milliers de jeunes complaisamment livrés à l’arbitraire des employeurs par les écoles de journalisme. Le grand public ne connaît généralement du journalisme que sa vitrine la plus clinquante. Il ignore à quel degré de médiocrité intellectuelle et d’imposture morale est parvenue, sous la conduite de ses élites autoproclamées, cette corporation où une minorité privilégiée régente avec arrogance et sans compassion une masse de jeunes gens auxquels quelques années d’études post-baccalauréat sans véritable substance ont permis d’atteindre ce niveau officiellement certifié d’inculture branchée et culottée, bavarde et narcissique, que semble apprécier et favoriser le monde politico-médiatique. Le lecteur trouvera dans cet ouvrage, sous la forme d’entretiens approfondis avec divers professionnels (presse écrite, quotidienne, nationale ou régionale, de magazine, télé, radio, etc.), une série de témoignages à la fois très éclairants et très émouvants sur le monde journalistique. Et, au-delà, sur une intelligentsia prolétaroïde dramatiquement représentative de ce que les métiers de la communication sont devenus aujourd’hui.
Devenons des médi@s alternatifs ! – Esteban – Ed. Le p’tit Gavroche, 2006
Ce livre est un condensé de tout ce qui concernait l’ensemble des médias pas pareils en 2006. Il recense un nombre incalculable de médias et aborde également des questionnements plus existentiels comme la création d’un média, l’internet citoyen, le copyleft, l’hébergement alternatif des sites web, l’Appel de Marseille lancé par les médias alternatifs de l’époque…
Plus qu’un annuaire, cet ouvrage est un outil de travail et de réflexion. Un peu comme le fut l’épaisse revue Alternatives publiée en 1977.
Almanach critique des médias – Olivier Cyran, Mehdi Ba – Ed. Les Arènes, 2005
Dans cet ouvrage, les auteurs comme les collaborateurs issus de divers champs scientifiques défendent des idées personnelles, un vécu, une histoire et proposent des procédés inédits pour de nouvelles pratiques communicationnelles. Dans une cette agora démocratique, est prépondérante la liberté d’expression, d’opinion et de critique. De ce fait, l’Almanach s’engage pour éviter que ne se reproduisent les tristement célèbres bavures écrites par le passé. Leurs répercussions dans l’espace public peuvent engendrer l’incompréhension, voire la haine ou le chaos. Mais le journalisme n’est pas une science exacte : si elle est constituée d’informations, il ne faut pas négliger sa part de désinformation ou de mal-information. L’Almanach critique des médias et Zalea TV (chaîne interdite de diffusion par le CSA) recommandent une « télégitime défense » et une méthode « d’auto-désentubage-cathodique », car « libérer la télé, c’est d’abord se libérer de la télé » (p. 351). Pour apprécier la lecture de cet Almanach, il faudrait le considérer comme un melting pot de différentes opinions et non comme un agglomérat homogène. Ou en quelques mots : un patchwork de satires qui réchaufferait le cœur de Méphistophélès, profondément troublant, coloré par de chatoyantes étoffes burlesques.
Histoires de médias – Robert Chesnais – Ed. Nautilus, 2001
L’importance du rôle de l’information et de la communication dans notre société pourrait faire croire que le phénomène est récent. Les textes rassemblés dans ce volume montrent qu’il n’en est rien. De la propagande électorale dans la Rome antique aux ancêtres d’Internet, en passant par les manipulations de la presse sous la IIIe République, les bouleversements de l’éducation à la Renaissance ou encore les affrontements politiques par médias interposés au XVIIe siècle, on découvre comment, dans ce domaine, ont été mis en oeuvre, depuis très longtemps, des moyens et des méthodes d’une étonnante modernité. Ce livre permet de mieux comprendre les enjeux actuels autour de la communication.
Guide des revues – Trois livres en un – Ed. Les Dossiers d’Aquitaine, 1996
Impressionnant par son épaisseur et le nombre de pages (305), ce guide présente 675 revues de toutes origines, de toutes tendances et de tous horizons. Il donne le point de vue de 300 directeurs ou responsable de publication. Il contient plus de 3000 adresses. Chaque titre est présenté avec des informations sur son fonctionnement, son financement et sa ligne éditoriale.
Alternatives – La presse d’expression locale – Ed. Alternatives, 1977
Pour la presse local, la seule connaissance du monde est celle qui part du mouvement social, qui s’y rattache et qui y intervient. Il ne s’agit pas de rapporter des « nouvelles », mais d’être le lieu du débat dans le mouvement social qu’occulte le système de la presse. Ceci n’est possible qu’en changeant le mode de production des journaux.
C’est ainsi qu’est présenté cet annuaire qui est également un guide pratique quant à la situation de la presse locale en cette mi décennie. Il nous propose un recensement très large de titres tout en accueillant de nombreux articles débattant de thématiques militantes, de savoirs-faire quant à la réalisation d’un journal, de critiques de la presse quotidienne et des groupes de presse qui commencent à se constituer.
Émile Pouget – Le Père Peinard – Roger Langlais – Ed. Galilée, 1976
Sélections de textes à travers lesquels Roger Langlais souhaite rattacher la pensée libertaire d’Emile Pouget aux mouvements révolutionnaires des années 1970.
Annuaire de la presse parallèle – Ed. L’Hespéride, 1974
Annuaire de 30 pages qui présente certainement la plupart des titres de la presse pas pareille de l’année 1974. Le classement est thématique. A noter qu’en 1974 l’explosion de la presse alternative, parallèle, indépendante n’en était qu’à ses débuts et que l’apothéose se situe en 1975/1976. La présentation est des plus technique et limitée avec la plupart du temps une adresse comme seul complément d’information au titre.
Hachette la pieuvre – Témoignage d’un militant c.f.d.t. – Ed. Comptes Consolidés, 1972
Voici le trust qui imprime sa marque sur les 50 millions de veaux que nous sommes, mis à nu. Qui “fabrique” l’information, on le sait, détient le pouvoir. La pieuvre Hachette, vous ne la voyez pas, mais elle est partout, dissimulée derrière des filiales ou des prête-noms. Jamais, dans aucun pays capitaliste, l’information n’a été concentrée en aussi peu de mains. Et ces mains-là ne se contentent pas de diffuser l’information, elles captent les esprits – notre cerveau – dès la maternelle.
Actuel n°8 – Mai 1971 – Branchez-vous sur la nouvelle presse
Article du journal Actuel sur la presse alternative, en France et ailleurs.
De la liberté de la presse à la presse de la liberté – Jean-Pierre Barou – Ed. La Taupe, 1970 (Bruxelles)
Très bonne analyse et présentation de la situation de la presse dans l’après Mai 68. L’auteur apporte une critique de la presse bourgeoise, dont le quotidien Le Monde qui utilise un vocabulaire impopulaire, hermétique à la masse. Il présente également les faiblesses de la presse de la liberté, la presse indépendante rattachée ou pas à un groupe politique, tout en défendant sa publication, sa diffusion et son nécessaire encrage populaire.
ATTENTION BRULOT FASCISTE !
La Haute Banque et les Trusts – Les financiers qui mènent le monde – Henry Coston – Ed. La Librairie Française, 1958
Militant d’extrême droite, antisémite et collaborationniste, Henry Coston dénonce dans cet ouvrage le fait que la presse était aux mains des banques. Il explique, dans deux chapitres consacrés à la presse, de quelle manière elle s’est mise au service de la Haute Finance… juive ! Document intéressant “historiquement parlant”, en sachant où on met les pieds ! Mais répugnant quant à la manipulation des données. Sa femme, Gilbert Borie, gérait la maison d’édition La Librairie Française qui publia ce livre.
La Résistance présente : La Dépêche – (1945)
Brochure écrite par divers mouvements de résistance de la région de Toulouse décrivant l’attitude de la Dépêche pendant la guerre 39-45
A propos de l’histoire de la Dépêche voir aussi les articles parus dans L’Empaillé.
Les Chiens de Garde – Paul Nizan, 1932 – Agone Editeur, 1998
Quel point commun y a-t-il, selon Serge Halimi, entre Michel Field, Claire Chazal, Alain Duhamel, Jean-Marie Cavada et PPDA ? La même révérence devant leur patron, les grands groupes tels Bouygues, Havas ou Matra-Hachette, la même révérence devant l’argent et le pouvoir politico-industriel, les mêmes pratiques. Maintenir à distance certains sujets pour mieux en matraquer d’autres, désinformer, moins par volonté de manipuler que par paresse et par reddition devant l’idéologie néolibérale dominante, c’est le credo des nouveaux chiens de garde. La collusion entre les intérêts des propriétaires de la presse française et le trust des trente journalistes qui en tiennent les rênes à coup de présence incessante, d’info-marchandise, de renvois d’ascenseurs et flagorneries de courtisans, sape l’indépendance des journalistes, fragilisés par la crainte du chômage.
“Des médias de plus en plus présents, des journalistes de plus en plus dociles, une information de plus en plus médiocre”, une sentence qui résume bien l’esprit de l’auteur qui, avec les résistants contre la pensée unique, hier Paul Nizan, aujourd’hui Chomsky, signe un plaidoyer lapidaire pour la dissidence intellectuelle. – Anne Barrat