Depuis l’arrivée au pouvoir de Trump c’est l’euphorie chez les marchands d’armes. Le 25 juin au sommet de l’Otan, les Européens se sont alignés sur la demande du président américain de faire passer leurs dépenses militaires à 5 % du PIB. Le budget français pour ses armées doit ainsi être porté à 220 milliards en 2035, contre 47 milliards en 2024 ! Localement, Carole Delga double à droite en plein virage : elle offre 200 millions d’euros du budget de la région Occitanie à ces usines de mort déjà gavées d’argent public (pages 7 à 8).
Chacun à leur façon, les partis de gauche parlementaire suivent le bruit des bottes. Sous couvert de «réalisme», pour être bien vus par la meute médiatique, et parce que ces gens-là assurent à qui veut l’entendre qu’ils sont là pour «gouverner» la France. Le parti socialiste – qui n’en finit plus de moisir dans un entre soi d’élu·es consanguin – hurle avec les loups macronistes pour réarmer le pays. Les Verts achèvent leur renoncement au pacifisme en soutenant eux aussi les plans de réarmement… à condition qu’on lance une grande dynamique de filière européenne, « souveraine » et « durable ». Des chars et des obus écolos, on aura tout vu ! Quand au PCF et à LFI, s’ils s’opposent aux va-t-en guerre du moment et réclament un pôle public de l’armement, ils soutiennent néanmoins « l’industrie de défense ». On a même vu les député·es insoumis·es proposer une loi de programmation militaire alternative, en réclamant davantage de moyens. Alors le camp anti-militariste, il faut aller le chercher dans les associations, les collectifs, les ONG, les syndicats et tout ce que le pays compte de gauchistes aux milles tendances. Et nom d’un chien, ça fait quand même du monde.
« Guerre à la guerre ». Ce mot d’ordre qui date de 1914-18 a été repris par une coalition regroupant notamment les Soulèvements de la terre et Urgence Palestine. En juin, elle organisait manifestation et débats contre le Salon de l’armement du Bourget. Camille, de l’association Survie y rappelait que « le récit national français nous enferme dans une lecture alternative de l’histoire selon laquelle nous serions « en paix » depuis 1945 ». Elle faisait pourtant le décompte : « Depuis les indépendances juridiques, l’armée française en Afrique c’est plus d’une cinquantaine d’opérations militaires. Beaucoup pour un pays qui est censé être en paix ». En réalité, selon elle, « pour les damnés de la terre et les ennemis de l’intérieur, la guerre, c’est la normalité ». Le chercheur Mathieu Rigouste élargissait le propos en affirmant que « le capitalisme, c’est la guerre depuis l’origine ». Il ajoutait : « Il est racial, il est colonial, il est articulé avec les industries du contrôle, de la surveillance, de la répression. Et ils s’étendent ensemble ».
Des travailleurs et travailleuses qui tentent de freiner la mécanique du génocide à Gaza étaient aussi représentés. Car si le blocage d’une expédition d’armes vers Israël par les dockers de Fos-sur-Mer a été médiatisé, des travailleur·ses s’organisent aussi dans d’autres entreprises comme dans les aéroports (chargements bloqués à Roissy par l’intersyndicale mi-juin) ou les puces électroniques (action conjointe de la CGT et d’Urgence Palestine devant STMicroelectronics à Grenoble en avril), etc.
Partout dans le pays des militant·es bataillent contre la production et le commerce des armes, contre la guerre à Gaza, en Ukraine, au Soudan, au Yémen… En région, des initiatives ont eu lieu à l’appel de « l’Assemblée contre la guerre » du mouvement autonome toulousain ou de l’Assemblée citoyenne locale de Carmaux, qui souhaite organiser un référendum pour déclarer leur commune « pacifiste et neutre ». Dans l’Hérault, c’est le Collectif antimilitariste de Montpellier qui se mobilise contre le plan Delga en affirmant « pas un euro pour l’armement, pas une larme pour la guerre ». Il ne s’agit pas de prôner un pacifisme jusqu’au-boutiste, mais d’être « réaliste », à notre façon : non, cette orgie de dépenses n’annonce pas la paix. Et à coup sûr, ceux et celles qui disent le contraire ne seront pas sur le front des guerres qu’ils préparent.