Lors du bouclage du numéro 4 de Curseurs sur la matérialité du numérique, nous nous étions promis de penser un numéro plus léger, plus ouvert à l’Internet que nous aimons, celui du partage et de la coopération.
Mais l’actualité ne nous rend pas la tâche facile. De la réélection de Donald Trump, avec l’allégeance des géants de la Tech envers sa politique d’extrême droite, au génocide à Gaza, les technologies numériques jouent un rôle majeur dans les massacres en cours, que ce soit dans leur versant médiatique ou technologique. Le dossier de ce numéro sera donc consacré à ces deux aspects, avec une série d’articles évoquant l’industrie de l’armement et de la surveillance.
L’affaire de l’explosion des bipeurs et talkies-walkies du Hezbollah les 17 et 18 septembre 2024 ont révélé au monde ce que les militant·es des libertés publiques et droits numériques savaient déjà depuis quelques années : Israël dispose d’une industrie de la surveillance technologique et de l’armement des plus développées. L’association Technopolice Bruxelles démontrera en trois temps l’ampleur de cette industrie qui non seulement se déploie et continue à se développer à Gaza, mais s’exporte jusque chez nous. Ils évoqueront ensuite les résistances palestiniennes à l’heure où la famine menace à nouveau les vies gazaouies.
Face aux silences et à la sidération devant ce génocide, Pipas exposera trois cas de complicités technologiques pour montrer qu’il est possible de comprendre et d’agir à partir d’ici et mettre la pression sur les sociétés technologiques internationales qui alimentent l’industrie de la Tech militaire et le secteur de la surveillance. Nous parlerons de drones, mais aussi de ce que parviennent à faire les archives syriennes avec les témoignages que sont les vidéos tournées et postées en ligne. Nous nous plongerons ensuite dans les résistances à la machine sécuritaire, chez nous dans les quartiers populaires, face à la police ou à l’administration algorithmique. Car la guerre, c’est aussi celle que nous menons au vivant ou celle qui est faite aux pauvres, notamment autour de la récupération des invendus alimentaires. Nous évoquerons encore les imbrications entre numérique et racisme.
Afin de ne pas oublier ce que nous nous étions promis, nous reviendrons sur le sens du numérique, qu’il soit sémantique avec une évocation du terme ordinateur. Nous soulèverons le capot de nos tours pour les mettre à plat, et révélerons ce que cachent les noms de domaine et le retour du Web indépendant.