Beaucoup de personnes, en Belgique, en Europe, dans le monde, ont peur de l’avenir. Le présent est déjà difficile à supporter. L’actualité locale, nationale et internationale secoue nos vies. Les pages d’axelle racontent cela, numéro après numéro, tissant des récits en chœur pour redonner du sens et, dans une certaine mesure, “remettre le monde à l’endroit”, comme nous l’expliquons dans le brouillon 1 pour un journalisme féministe que nous publions ce 11 novembre, journée belge des femmes, avec une immense joie. Vous retrouverez des extraits du brouillon dans notre prochain numéro ; clamons déjà notre gratitude à toutes les lectrices ayant répondu à notre grande consultation en début d’année. Ce sont vos mots, vos attentes, qui ont guidé l’architecture de notre travail.

Notre mission, écrivais-je, est donc de mettre en mots le monde d’aujourd’hui. Ce n’est pas tout le temps facile, c’est même souvent éprouvant. Aussi avons-nous ressenti la soif intense, radicale, de penser un futur désirable. À quoi concrètement ressemblerait un avenir meilleur pour toutes les femmes qui nous confient leur histoire, pour toutes celles qui nous lisent, pour celles qui ne nous lisent pas, et aussi pour nous-mêmes ? Nous avons eu besoin de nous y plonger entièrement. Quitte à nous couper du présent… le temps d’un dossier.

Nous nous sommes donc réunies, nous avons rêvé ensemble. Et le rêve que nous avons mis en commun est celui d’une société dans laquelle il n’y aurait plus de féminicides. Comment nous, journalistes, pourrions-nous traiter une telle actualité ? Sommes-nous même encore des journalistes lorsque nous écrivons l’avenir ? Comment nous appuyer sur ce que nous avons déjà analysé de la réalité et brassé comme pistes de réflexion ? L’exercice en lui-même, un pari en équilibre sur une cordillère entre fiction et réalité, fut réparateur pour nous. Nous espérons de tout cœur qu’il alimentera la capacité d’autres femmes à aspirer, à rêver, car cette capacité est sans doute notre plus grande force collective. Chérissons-la.

Sabine Panet.

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